L'existence d'Adam et Ève et le péché originel

« Les croyants éduqués le savent bien : l'histoire d'Adam et Ève est une fable. Les sciences du vivant sont catégoriques : il ne peut pas exister de couple originel à l'espèce humaine, car ce n'est pas ainsi que fonctionne l'évolution. [...] L'histoire du péché originel est un mythe sur lequel il n'est pas raisonnable de faire reposer une réflexion sérieuse sur l'origine de l'humain » (p. 32).

Cette affirmation de Thomas Durand témoigne d'une méconnaissance manifeste du christianisme. Au cas où le zététicien ne serait pas au courant, les chrétiens (et en particulier les catholiques) croient que Adam et Ève sont des personnages historiques. Dire qu'ils « savent bien » qu'il s'agit d'une « fable » est donc une parfaite absurdité.

Le Catéchisme dit ceci (§ 375) :

« L'Église, en interprétant de manière authentique le symbolisme du langage biblique à la lumière du Nouveau Testament et de la Tradition, enseigne que nos premiers parents Adam et Ève ont été constitués dans un état "de sainteté et de justice originelle". »

Contrairement à ce que Thomas Durand pourrait croire, cette affirmation ne réfute en aucun cas l'évolution des espèces. L'Église n'exclut pas le fait que Dieu ait « préparé » le corps humain à travers l'évolution. En revanche, elle enseigne que l'âme humaine spirituelle ne peut pas provenir de l'évolution et que, à un moment donné dans l'histoire, elle a été insufflée par Dieu à Adam et Ève qui devinrent, par ce fait même, le premier homme et la première femme. Du point de vue de la théologie chrétienne, il est faux de dire que l'Homme au sens propre descend du singe, mais il est juste de soutenir que le corps humain a probablement évolué de l'espèce Homo sapiens avant que l'âme ne lui soit insufflée. Ce n'est qu'à partir de cette insufflation qu'on peut dire que le premier homme et la première femme ont été créés. En effet, l'être humain n'est vraiment une personne qu'à partir du moment où le corps, l'âme et l'esprit sont unifiés.

En quoi affirmer que Dieu aurait choisi d'insuffler une âme (immatérielle) dans un corps humain à un moment donné dans l'histoire serait-il contraire à l'évolution ? Il est absurde au niveau épistémologique de suggérer une incompatibilité entre les deux, puisque la science est en principe incapable de se prononcer sur l'existence de l'âme (elle n'étudie que ce qui est matériel et l'âme est immatérielle). Par conséquent, l'existence d'Adam et Ève en tant que personnes unifiées est tout à fait compatible avec la théorie de l'évolution 266.

On comprend alors la stupidité de cette affirmation :

« La biologie est décidément une science incommode pour le théisme, puisqu'elle réfute l'existence d'un couple d'humains originels. Adam et Ève sont un mythe » (p. 181).

Notes de bas de page

266 Le pape Pie XII disait déjà en 1950 que les catholiques étaient libres d'adhérer à la théorie de l'évolution s'ils maintenaient que l'âme humaine n'en provenait pas : « L'Église n'interdit pas [...] la doctrine de l'évolution — pour autant qu'elle recherche si le corps humain fut tiré d'une matière déjà existante et vivante [...] » (encyclique Humani Generis).